Les lobbyistes occupent une place
croissante dans les médias. Épaulés par des experts aux ordres et des
journalistes crédules, ils influencent avec régularité le contenu de
l’information jusqu'à la FAIRE.
La presse est l’un des éléments les plus sacrés
de l’imaginaire. Les journalistes, prêtres de la vérité occupent aux côtés des
détectives et des inspecteurs de police une place mythique dans les esprits,
l’archétype restant le petit gars qui travaille à toute heure, à l’affût
d’indices et des contradictions les plus subtiles, infatigable, qui œuvre pour
que la vérité éclate et les méchants soient punis, image romantique des séries
ou de Hollywood qui puise son inspiration dans la vie. Par exemple avec Les
Hommes du Président dans lequel Robert Redford et Dustin Hoffman incarnent Bob
Woodward et Carl Bernstein, deux journalistes du Washington Post qui ont
effectivement enquêté sur le rôle du président Nixon dans le Watergate. Les
dernières images soulignent avec emphase les pouvoirs de la presse. Vingt ans
plus tard, leur saga figure en bonne place dans les manuels scolaires. Mais ce
qu'ils oublient de préciser, c’est que Woodward et Bernstein étaient
pratiquement seuls dans leur traque acharnée de ce scandale qui éclata au beau
milieu de la campagne des élections présidentielles de 1972 et n’eut aucune
influence sur les résultats; il n’a fallu qu’un coup de fil de la
Maison-Blanche pour dissuader le directeur de CBS de diffuser avant les
élections ce reportage exceptionnel et Nixon fut réélu à une écrasante
majorité. Il ne fut contraint de démissionner que deux ans plus tard.
En réalité, le personnel est sous-payé et
surchargé. Si on est en droit d’attendre que la presse libre et indépendante
fournisse toutes les informations susceptibles de nourrir le débat public,
révéler la corruption, éclairer les principaux problèmes sociaux et permettre à
des citoyens bien informés de prendre des décisions, en fait, le journalisme
est en pleine débâcle et cette déliquescence ouvre la porte aux agences de
lobbying envahissant et régnant dans les salles de rédaction. Les médias constituent
en eux-mêmes une énorme et juteuse affaire, propriété d’un club de plus en plus
fermé de multinationales dans la plus grande discrétion. Dans les années 1980,
la plus grande partie des médias américains étaient sous le contrôle d’une
cinquantaine d’entreprises géantes elles-mêmes financièrement liées à de
grosses sociétés industrielles et à quelques banques internationales..
Certaines voix échappaient au contrôle de ces entreprises dominantes mais la
plupart de ces réfractaires appartenaient à de petites structures locales dont
le murmure était enseveli par le fracas des principaux. En une décennie la
concentration des médias s’est accélérée : plus de la moitié appartiennent
à moins de vingt géants des affaires. Les conflits d’intérêts entre le besoin
d’information et la pub dite "information positive" ou "publi
reportage" que privilégient les entreprises ne cessent de s’aggraver.
Lorsqu’une grosse entreprise achète un journal local, la qualité s’en ressent à
très court terme. Ils pratiquent un journalisme minimal où la partie éditoriale
est la matière grise qui remplit les blancs entre les espaces publicitaires.
Les propriétaires du journal gardent alors juste ce qu’il faut de personnel
pour maintenir la parution, cessent de réinvestir les bénéfices pour les
détourner au profit de la maison mère, valorisent le contenu publicitaire et la
rentabilité ; au bout d’un an ou deux, les derniers éléments du personnel
éditorial tellement occupés à assurer la
survie n’ont plus le temps d’enquêter ni de vérifier les faits et la
publication ne repose plus que sur les dépêches des agences de presse. Les
journalistes aux abois se résignent à se cantonner dans le clinquant, le facile
et les faits divers.
Un tel
contexte est très profitable aux lobbyistes. Les consultants adaptent leurs
communiqués aux journaux. De ce fait, une grande partie des informations que le
public lit, regarde ou écoute est influencées et déformée par ces gens
propriétaires de pans entiers de l’information. Les rubriques "cuisine, diététique,
loisirs, auto-moto, immobilier, décoration ou vie pratique sont un paradis et
les "nouvelles", saucissonnées par des consultants et des
journalistes ressemblent à s’y méprendre à de vraies informations. Le lecteur a
beaucoup de mal à le démêler. Aujourd’hui,
le nombre des attachés de presse est supérieur à celui des journalistes
professionnels, et l’écart ne fait que se creuser. Un reporter est assailli
chaque jour par des dizaines de dépêches ou d’infos transmises par téléphone,
lettre, fax et mail.
Ex : la société X qui prétend être depuis 40
ans le "leader incontesté dans la diffusion des informations des
entreprises, des associations et des institutions auprès des médias et du monde
de la finance", possède 19 bureaux et distribue chaque année 100 000
communiqués de presse à l’attention de 2 000 rédactions pour le compte de plus
de 15 000 clients. Elle offre donc de l’info toute faite pour le compte de ses
clients –firmes, entreprises- qui la rémunère grassement, à des journalistes
qui vont s’en emparer sans la vérifier. Certaines agences se spécialisent même
dans la diffusion auprès de la grande presse d’articles de fond ou de tribunes
"libres" (!) écrits par des lobbyistes sur des sujets divers et ayant
toute l’apparence de "vraies" infos. La société Y par exemple, envoie
à 10 000 journaux et magazines des "reportages en kit" qui ont pour
objet de promouvoir un produit ou de servir les objectifs politiques de ses
clients : des dépliants publicitaires qui ne disent pas leur nom et n’en
ont pas l’air. Et la plupart sont reproduits en totalité ou
partiellement ! Dans la foulée, les élus reçoivent des lettres
enchantées. Une agence du même genre propose même des scripts pour des
émissions d’ "information" de haute tenue à plus de 5 000 stations de
radio adaptés à leurs besoins. "Nous nous chargeons de l’écriture, de la
frappe, de l’impression et de la distribution". Les journalistes
surchargés de travail accueillent cette offre très intéressée avec plus de
soulagement que de méfiance. Une bouée pour les jours où il ne se passe
rien.
Associated
Press gagne désormais beaucoup d’argent en diffusant sous forme numérisée des
photos d’agences-conseil aux 400 journaux qui ont accepté de les recevoir. Le
24 juin 1994 par exemple, le Times a publié un long article annonçant que le
transporteur F. E. était devenu F.Ex – scoop d’un intérêt assez limité… Il
s’agissait d’une campagne de communication lancée par F. Ex. et la photo
illustrant l’article montrant un jet estampillé F.Ex renvoyait simplement à
Associated Press, payé par F. E pour numériser la photo – réalisée par ses
soins – et l’adresser aux journaux. La diffusion généralisée de reportages
"clés en main" pour la radio ou la télévision est une pratique peu
connue qui date des années 1980, lorsque les agences de lobbying se sont
aperçues que les diffuseurs acceptaient de présenter comme des reportages
d’information les séquences, voire les programmes entiers qu’elles pouvaient
filmer, mettre en forme et produire. 92% des rédactions utilisent des
reportages distribués gratuitement. Ces "reportages" préfabriqués
sont fournis par lots de deux versions différentes, la première est complète,
avec des commentaires préenregistrés ou un script indiquant les moments où le
journaliste doit lire son texte, la seconde comprend les images brutes que la
chaîne peut monter comme bon lui semble, les combiner avec des images provenant
d’autres sources ou les passer telles quelles. "Il y a deux approches
possibles de la part des chaînes de télévision. Les plus grandes ne veulent pas
entendre parler de reportages tout prêts, disposant du budget et du personnel
pour monter elles-mêmes leurs émissions –affirment-elles- mais les petites
chaînes locales sautent sur l’occasion. Ces reportages préfabriqués sont des
produits aussi largement diffusés par les agences de lobbying que les
communiqués de presse classiques. Cela vaut aussi pour l’info brute. Par
exemple, après que des bruits inquiétants eurent couru sur une affaire de
falsification de boissons, un "reportage" sur ce sujet a été adressé
aux trois chaînes de télévision de la capitale. Toutes les trois l’ont utilisé
au cours des bulletins d’information du lendemain, ainsi que cinq autres.
Interrogées par la suite, elles ont cependant
démenti.. mais sont parfois trahies par leurs propres annonceurs. Susan
Trento : en 1985, X Company a distribué un reportage préfabriqué provenant
de Y consulting comportant une interview de l’un de ses clients, le roi Hassan
II. La diffusion de cette séquence a provoqué un véritable scandale, du coup les
journalistes se sont plaints qu’on les ait trompés. Démentis par un responsable
de Y Consulting qui épingle leur hypocrisie : "Un certain nombre de
journalistes après l’annonce de la distribution de reportages prêts à l’emploi
ont protesté.. les mêmes qui à la moindre occasion m’appellent pour pouvoir se
les procurer… serait-il possible de leur adresser une cassette par transporteur
le soir même, afin qu’ils puissent la diffuser le lendemain ?.. J’ai été
scandalisé de ce double langage des médias. Ils sont libres d’utiliser nos
séquences, de les rejeter, d’employer la bande B ou d’écrire leurs propres
scripts. Mais la plupart d’entre eux les reçoivent et les diffusent aussi sec.
Ils mettent dans la machine et ils appuient sur la touche lecture. En le cas,
ils ne pouvaient ignorer d’où provenait le reportage."
L’interpénétration croissante des informations et
de la publicité est "gênante" observe (!) un consultant en relations
publiques.. parce qu’elle affaiblit la crédibilité des médias traditionnels.
"Chaque fois qu’un journal prévoit dans ses pages un espace publicitaire
gratuit, ou chaque fois qu’une chaîne de télévision présente un publi-reportage
comme s’il s’agissait d’un vrai documentaire, les responsables de ces médias
dévalorisent leur produit. Nous ne pouvons nous permettre de tuer la poule
aux œufs d’or. Si le public venait à retirer sa confiance aux médias, le
résultat pourrait être catastrophique." (!)
Les publicitaires ont compris depuis longtemps
que l’un des moyens les plus efficaces de convaincre le public est de faire
passer un message par la voix d’un "spécialiste" unanimement reconnu
– chercheur, médecin ou professeur d’université. Le spot publicitaire où
apparaît un acteur professionnel vêtu d’une blouse blanche de laboratoire
annonçant avec autorité que "la recherche prouve" la supériorité
absolue du produit présenté est devenu un genre télévisuel à part entière. Les
consultants sont désormais également passés maîtres dans l’art de se faire
cautionner par un "expert indépendant impartial" – ruse
grossière qui, malgré la réputation de méfiance des journalistes, marche
pratiquement à tout coups. Cela va plus loin encore : une agence-conseil offre
par exemple a des journalistes en quête d’informations un service
d’"assistance" en ligne dont le siège se trouve à l’université de
l’État de New York, par e-mail. Leurs demandes sont alors relayées à plus de
800 professionnels des relations publiques appartenant à des instituts de
recherche.. qui se chargent de trouver dans leur écurie des chercheurs
susceptibles de "traiter le sujet". Des chercheurs ad hoc évidemment,
favorables aux produits et services de clients de l'agence qu'elle a pour
mission de promouvoir !
Parfois, c’est plus direct encore. Les agences de
lobbying financent des "instituts de recherche à but non lucratif"
dont les "experts indépendants" roulent pour eux moyennant finances. Le Conseil américain pour la science et la
santé par exemple dirigé par Elizabeth Whelan est un groupe-écran utilisé
par les industriels dont l'activité tourne autour de l’agro-alimentaire et de
l’industrie chimique. Il se présente comme un institut scientifique
"indépendant et objectif". Cette prétention a été examinée par un
chroniqueur du Washington Post, Howard Kurtz qui s’est intéressé aux financements
dont bénéficie ce "conseil pour la science et la santé". Il fait par
exemple volontiers l’éloge de la restauration rapide. Et devinez ? parmi
ses financeurs, on compte Burger King. Il minimise les liens entre nourriture
trop grasse et maladies cardio-vasculaires.. Devinez ? Des entreprises
agro-alimentaires comme Oscar Meyer, Frito Lay et Land O’Lakes font partie de
ses sponsors. Il prône les vertus de la saccharine? Devinez ? C’est
Coca-Cola, Pepsi qui mettent la main à la poche. Enfin, s’il tacle une campagne
contre les huiles tropicales trop riches en graisses – contenues en abondance
dans le pop-corn – c’est que des fabricants d’huile de palme le financent
aussi. "Il n’y a jamais eu un seul cas de risque sanitaire lié à
l’utilisation raisonnable de pesticides agréés dans notre pays" prétend
aussi ce très indépendant conseil.. qui reçoit également de l’argent d’une
flopée de fabricants de pesticides. Pour coiffer le tout, on a aussi une
campagne anti écolos, ces fadas "aveuglés par l’idéologie qui n’ont pour
seul objectif que de détruire la libre entreprise et qui font tout ce qui est
en leur pouvoir pour ruiner les entreprises etc.."
Les journalistes vérifient rarement leurs sources
en profondeur. Si bien que les spécialistes de groupes tels que le Conseil
américain pour la science et la santé sont souvent cités comme de véritables
experts scientifiques sur les plateaux de TV (Elisabeth Whelan étant
présentée sans rire comme "l’un de ces nombreux savants qui craignent
qu’une surestimation des risques encourus n’ait pour effet paradoxal de
détériorer la santé de nos concitoyens")…
Ce type d’"experts" sont légion qui
manipulent les statistiques pour cacher à l’opinion publique, entre autres, la
progression des cancers dans les sociétés industrielles. "Nous savons
aussi qu’il n’y a pas d’épidémie de cancer, affirme-t-elle. La plupart des
chiffres, dans ce domaine, restent constants depuis des décennies. Nous vivons
une époque merveilleuse… etc.." Ce postulat a été repris, par exemple "Ressources
pour le futur", institut pro-industriel dont le président affirme
""si notre cadre de vie était aussi dangereux qu’on le prétend,
comment expliquer que nous soyons en meilleure santé et que nous vivions plus
longtemps que nos aînés ?"… est lui aussi présenté comme un
"groupe de réflexion sur les questions écologiques" (!) alors que des
chercheurs véritablement indépendants ont constaté que le nombre de cancers
augmente et que les produits chimiques, amiante, benzène, arsenic, amines
aromatiques, goudrons, chlorure de vinyle, chrome et poussière de bois jouent
un rôle important dans ce développement, ainsi que les pesticides
-notamment chez les agriculteurs-.
"Nous commençons à peine à comprendre la gravité des risques sur notre
santé d’une exposition prolongée à certains facteurs environnementaux ou
professionnels, concède un récent rapport de l’Institut national de la lutte
contre le cancer. Une prise en compte insuffisante des risques potentiels liés
à l’environnement et aux contaminants agro-alimentaires, ajoutée aux
réglementations et aux dispositifs de protection et de promotion dont jouit
l’usage du tabac, aggrave le problème du cancer et augmente considérablement
les coûts de la santé."
Le syndrome de la porte à tambour. Les
journalistes rarement capables d’analyser leur propre milieu professionnel et
le rôle des agences de lobbying sont largement dépendants de ces agences en
matière de sources, de citations, de sujets et même d’idées. Ceux qui sont à
l’extérieur – lecteurs ou spectateurs – ont beaucoup de mal à décrypter cette
dépendance qui constitue un élément essentiel du fonctionnement de la presse.
Par ailleurs, comme un alcoolique qui refuse d’admettre qu’il a un problème
avec la boisson, ces journalistes sont trop lourdement intoxiqués par les lobbyistes
pour s’apercevoir que quelque chose cloche. Les nouvelles
"préfabriquées" et les "experts" obligeamment fournis par
les industriels sont d’une efficacité d’autant plus redoutable qu’ils ne
peuvent que rendre service à un directeur de chaîne soucieux de ses finances.
Lorsqu’une chaîne diffuse un "reportage en kit", l’agence-conseil qui
le lui a fourni a déjà payé les frais de script, de réalisation et de montage.
De la même façon, les "spécialistes" poulains des lobbyistes permettent
aux journalistes d’appuyer leurs articles sur des avis "documentés"
en y consacrant un minimum de temps et d’énergie… et gratos -ils sont déjà
payés par les entreprises-.
Mais il arrive que les pressions financières
soient plus directes. Au Canada, Ben Parfitt, chargé de la rubrique forestière
pour Vancouver Sun avait entrepris d’enquêter sur les industriels du bois -dont
Burson-Marsteller est l’agent-conseil- en Colombie-Britannique. Mais entre
temps, celui-ci élargit sa clientèle au Sun! et des cinq journalistes couvrant
le sujet, exploitation forestière, pêche, Amérindiens, énergie, mines et
environnement, seul Parfitt fut maintenu.. mais prié de limiter son intérêt à
Vancouver et aux basses terres éloignées du secteur où des firmes clientes de
BM exploitaient de très anciennes forêts formant un écosystème rare et
précieux. Il a donc fait paraître son article dans une autre publication, The
Georgia Straight qui évoquait le passé de Burson-Marsteller et notamment ses
efforts pour améliorer l’image internationale de l’Argentine après que la junte
militaire eut exécuté des milliers d’opposants. Il y révélait également qu’un
de leur cadre Ken Rietz était l’un des conspirateurs-clés du Watergate. Après
la parution de cet article, Parfitt a été sommé d’abandonner sa rubrique du Sun
sur les questions forestières.
Les annonceurs publicitaires ont une énorme
influence sur le contenu même des informations bien que les rédacteurs en chef
le démentent. Seulement dans les médias américains, les grandes entreprises
investissent cent milliards de dollars par an dans la publicité, lesquels
tombent directement dans les caisses des médias. L’auteur de The Media
Monopoly, Ben Bagdikian, souligne qu’un travail de "sélection attentive
des sujets d’actualité, visant à rendre la publicité plus efficace, est devenu
si courant qu’il a été promu au rang de technique de pointe et de savoir-faire
éditorial*". Le consultant Robert Dilenschneider admet que "la notion
selon laquelle, dans la presse et les médias, la gestion de l’entreprise est
nettement distincte des choix éditoriaux est en grande partie un mythe".
Fusions, rachats et nouvelles technologies
électroniques ne font qu’accélérer l’effondrement des murs censés séparer
journalisme, publicité et relations publiques. Deux des plus grosses agences-conseil
du monde dont Burson-Marsteller sont aux mains des deux plus gros conglomérats
publicitaires qui achètent des milliards de dollars d’espaces publicitaires
dans la presse et à la télévision.
Un fait marquant et capital. Le Centre d’étude
des pratiques commerciales, association à but non lucratif, a invité en 1992
quelque 200 journalistes à une conférence de presse au cours de laquelle a été
distribué un rapport intitulé : comment la pression de la publicité peut
corrompre une presse libre, et qui signalait des dizaines de cas d’auto-censure
résultant du contexte "imposé par les annonceurs et de pressions
afférentes". Presque aucun des journalistes invités n’a assisté à cette
conférence et le rapport n’a généré pratiquement aucun commentaire dans la
presse !!
Les entreprises ont découvert que l’un des
meilleurs moyens d’obtenir la faveur des journalistes était d’inviter les plus
célèbres d’entre eux à faire une brève intervention en échange d’une grosse
somme d’argent. En 1993-1994, dans le cadre du débat sur la réforme du système
de santé, le National Journal rapporte que l’industrie pharmaceutique et ses
satellites s’employaient à "arroser les journalistes qui voulaient bien
dire quelques mots à l’occasion de leurs rencontres". De grandes figures
médiatiques se sont vues offrir un "dédommagement" allant de 7 500 à
25 000 dollars. La plupart des journalistes n’atteignent jamais un niveau de
célébrité suffisant pour toucher cette manne. Fusions et réductions de
personnel ont des effets dévastateurs sur les salles de rédaction. De nombreux
journalistes se trouvent contraints de quitter la profession à la trentaine
tant il leur devient difficile de faire vivre une famille, cotiser pour leur
retraite et payer les études des enfants. Et puis ils voient des ex-collègues
quitter la profession et multiplier leur salaire dans la communication ou le
lobbying …
C'est la porte à tambour,
placée entre le gouvernement et les lobbies, entre la presse et les
agences-conseil. Comme ces attachés parlementaires tentés de vendre leurs
compétences et leur carnet d’adresses en échange d’un salaire de lobbyiste, les
journalistes fauchés cèdent souvent au chant des sirènes. Susan Trento : cette porte à tambour et
la collaboration qu’elle nourrit entre les privilégiés expliquent
l’impasse dans laquelle se trouve engagée la politique américaine :
"personne ne cherche jamais à assainir la situation, les
mêmes commettant sans cesse les mêmes malversations et n’étant jamais
punis sans que personne ne s’en préoccupe. Parce que personne ne le sait. Les trois côtés du triangle
constitué par les médias, le gouvernement, et les agences de lobbying se
protègent mutuellement."
Extraits du livre de John Stauber et Sheldon Rampton, traduction HL, "L'industrie du mensonge".
* Par exemple il ne convient pas qu'une publicité pour "EDF plein ciel" soit intercalée entre deux séquences du "Syndrome chinois" ou de "Karen Silkwood" ! ou au milieu d'un reportage sur Fukushima si soft soit-il.
* Par exemple il ne convient pas qu'une publicité pour "EDF plein ciel" soit intercalée entre deux séquences du "Syndrome chinois" ou de "Karen Silkwood" ! ou au milieu d'un reportage sur Fukushima si soft soit-il.